Depuis la nuit des temps et comme nous le dit le philosophe Richard David Precht, l'homme est un éternel insatisfait. Vous vous reconnaissez un chouille ? Pour certains un défaut, pour d'autres une qualité et pour la musique électronique, un atoût pour partir à la recherche de sons plus alambiqués et ingénieux. En partant aux confins de la créativité, il en résulte parfois des sonorités presque absconces qui ceci dit en démontre long sur la complexité de notre gentil mais compliqué cerveau. L'électronica est donc le fruit de l'insatiabilité d'artistes face à une house et une techno des années 90 qui commençaient à s'essoufler par faute de renouveau. On peut relever deux sources majeures comme point de départ à ce sous-genre : Le premier est la compilation Articial Intelligence paru sur le label Warp de Shefielden 1992, considérée comme LA référence. On y écoute des artistes tels que Autechre, Speedy J ou encore The Dice man et UP! qui seront connus plus tard sous les célèbres noms de Aphex Twin et de Richie Hawtin. Toujours en 1990, la seconde source provient de la création d'Apollo recording, une sous-division électronica du label techno belge R&S records qui a signé des musiciens comme Biosphere, David Morley, Atlantis et Aphex Twin lui même. L'électronica est un genre qui a ouvert la porte à l'expérimention des musiques marginales, elle amena le post-rock loin de ses guitares tant chéri, désenchaina la techno de ses kicks répétitifs vers un univers de mélodies et elle électrisa le jazz de manière ephémère. Souvent utilisée comme une catégorie poubelle où l'on y range les tracks nous donnant du fil à retordre quant à son style; elle est au contraire une porte ouverte vers l'essai, où l'on retrouve des sons parfois dissonants, dérangeants, où les structures et les sonorités peuvent parfois être si décalées qu'on se demanderait presque si son auteur était bien à jeun lors de sa composition. Teintée de minimalisme, elle est en quelque sorte « un rejet de toute ordonnance traditionnelle-mélodies que l'on pouvait fredonner, rythmes que l'on pouvait suivre en tapant du pied »1, somme toute une musique désarticulée que l'on manie à la guise de nos contradictions tel un pantin inanimé. C'est alors toute une génération qui s'étend plus loin que le genre techno qui est partie à la quête de « mélodies [étant] comme répandues de manière erratique, comme si elles étaient dotées de libre-arbitre, tandis que les minuscules figurines ou motifs rythmiques tissaient en arrière-plan une toile denuée de structure évidente ».2En effet, outre des personnalités comme Autechre, des labels comme Ninja Tune ou Mo'wax se sont eux aussi inscrits dans ce courant au travers ce que l'on appelle l'abstract hip-hop avec des artistes comme dj shadow et dj Krush. En parallèle et tout en continuant à signer sur d'autres labels ainsi que d'autres Aka, Aphex twin prestidigitateur de musique ouvre son label Rephlex en 1993. Il est salué par la presse et le public car ce n'est pas tous les jours que nous avons le droit à d'aussi belles performances musicales et esthétiques. Cette même année sort le label allemand Mille plateaux qui signe notamment un certain Microstoria qui avec ses « créations [manipule] les composants fondamentaux de la musique dans ses moinres détails, comme pour effacer nos repères familiers »3. Ce dernier inspiré d'un certain Oval qui « manipulait [aussi] les surfaces des cd, les rayait ou les détériorait à l'aide de peinture pour en échantillonner les sons résultants, qu'il mettait en boucle et retravaillait ensuite pour créer des disques troublants comme systemisch et 94diskont »4.C'est sûr, en thème de dépassement de l'entendement, on en tient déjà un bon bout mais que pensez vous de Scanner qui lui, tenez-vous bien volait des conversations téléphoniques qu'il remanipulait avant de les intégrer à ses tracks, une petite impression d'être dans la vie des autres peut-être ? Ceci dit, Scanner a été un pionnier en terme d'électronica. Nous pensons que toutes ces illustrations vous on fait comprendre les fondements de ce sous-genre, on ne prendra pas le risque de vous bassiner avec d'autres exemples car comme dans tout sous-genre, il y a encore des sous, des sous et des sous... Dans un autre registre, en 1998, Boards of Canada sort son album atmosphérique Music has the right to children sur Warp. Inluencé par le Abstract hip-hop, le pop rock et des groupes comme Mogwai ou encore Massive Attack, il marquera au fer rouge l'étendu des possibilités que recèle le mot électronica. Dans la même lignée, on retrouvera des artites comme Flying Lotus ou Polygon Window. En 1999 sort le label allemand Raster Noton qui est la fusion entre raster music et noton. Il deviendra un des plus gros label de musique électronica/IDM et signera des artistes de grandes renommée comme Atom tm, komet, kyborg, mark behrens, mark fell et beaucoup d'autres. Si d'ailleurs cela vous intéresse vous pouvez aller jeter un oeil sur le facebook en cliquant ici. Leur objectif bien plus que d'ouvrir un simple label est de pouvoir mélanger différents arts comme la musique et le design, somme toute avec l'idée de donner à la musique une certaine matérialité. Dans tous les catalogues de ce label, on y trouve des livres, des magasines, des dvds … Ce label basé à Chemintz et Berlin est tenu par Olaf Bender en collaboration avec Carsten Nicolai et a reçu en 2000 l'award golden Nice par l'organisation Ars electronica. Ce qui ressort beaucoup de tout ce travail sur la musique électronica et de sa philosophie est qu'elle tente de se focaliser sur les interfaces numériques plus que sur la créativité à proprement parler. Pour ces artistes les « interfaces nous offrent immédiatement de nombreux modes temporels nouveaux, des éléments d'imprévisibilité instantanée, ainsi qu'une production complexe et ambitieuse »5. L'electronica est un sous genre rebel qui s'intéresse à la science, au dépassement des limites de l'inventivité en destructurant la musique pour la retravailler hors de ses codes traditionnelles mais aussi à sa matérialisation. Max Cooper, génie de la sublimation musicale à récemment mis en place un système de son en 4D dont vous pouvez lire l'explication ici. Même si ce sous-genre apparaît comme complexe, il a permis à des artistes plus récent comme Dominik Eulkberg, Extrawelt ou encore Max cooper lui-même de créer des morceaux qui nous entraînent dans tout ce que la musique a de plus beau. Derrière une musique destructurée, ils intègrent des nappes, d'étranges éléments musicaux propre à ce genre pour réveiller en nous comme une douce mélancolie d'un soir d'été ou tout simplement de la beauté d'un lever de soleil. D'une certaine manière, on retrouve dans l'électronica une forme d'aboutissement de la musique électronique car elle a su fusionner des caractéristiques propre à plusieurs genres (minimale, techno, Jazz etc...) pour les magnifier. Certaines productions sont d'une délicatesse et d'une beauté rare, et si vous avez encore un doute, allez faire un tour sur la petite playlist que l'on vous concocté avec amour juste en dessous. Liza Tourman.