Proche du rivage, À une larme du naufrage Hurle cette gorge Que l'on écorche. Les mots s'échappent Et s'englottent à travers leurs échos, Leurs résonnances vibrent le chaos. Chavirée par la marée, L'écume traîne son amertume, la vague l'étale sans état d'âme. C'est l'histoire de cette rengaine Éternelle par son essence même Cette histoire qui n'en est pas Étouffée avant même d'avoir pu naître. Un chemin dont le tracé s'est effacé Une route volatilisée, Échappée. Un récit collectif, Censuré et émietté, Dépouillé de ses motifs. C'est le cri humain, Des ombres des naufragés Sans nom Et sans parure. C'est le murmure d'une chaire sans armure, D'une liberté tailladée Par ces lacéreurs de rêves, Voraces et sans matière. Aux dents aiguisées, Et aux reflets d'acier. Ces dents qui déchirent, l'étroit tissage des savoirs Et rendent les liens élastiques. Paroles silencieuses, Les mots se noient dans les pleurs, enfouis dans les entrailles de l'amnésie. Qui portera la mémoire des disparus ? Un à un les noms Se floutent Ne laissant que leurs reflets Face à leurs plaies béantes Et saignantes. Cicatrices sans matrices, De ces larmes échouées sur nos rivages