Qui n’a jamais rêvé de voler ? De déployer ses ailes vers de nouveaux horizons ? Ou, de s’être surpris à envier les oiseaux, ces êtres sauvages, qui nous ont inspiré nos avions ou poussé Icare à la mort car il s’était pris pour l’un d’entre eux. Il en a brûlé ses prothèses confectionnées de plumes et de cire en s’approchant trop près du soleil. L’oiseau, véritable symbole de liberté a, dans chaque culture, une signification particulière. En Afrique, il est l’allégorie de la puissance de la vie, de la fécondité ; chez les Indiens d’Amérique, il permet la communication avec les dieux. Chez les Indiens d’Inde et en occident, il est la représentation de l’âme individuelle et de l’Esprit Universel. Il est présent dans les religions comme le christianisme. Dans la bible, on y trouve la colombe, le pélican, l’aigle, le coque ou encore le rouge-gorge. Dans le Coran, il est l’immortalité de nos âmes et dans l’Islam, ils sont des anges. D’ailleurs ne dit-on pas prendre son envol en écho à notre émancipation ? Pourtant, ces dernières années, notre monde devient silencieux. En effet, l’Europe a en 30 ans perdu plus de 421 millions d’oiseaux : Le chardonneret élégant, le coucou, le milan royal, la perdrix grise, le gypaète barbu… La liste est longue, la situation alarmante. 275 espèces sont touchées dont 32 % des oiseaux nicheurs comme le moineau friquet qui a quasiment disparu. On ne le répétera jamais assez, c’est une véritable hécatombe. La plupart des causes sont en lien direct avec les activités humaines et sa surpopulation. Cependant tout espoir n’est pas perdu. Nichée dans une montage de Suisse valaisanne, près du village de Salvan aux Marécottes, l’association « Nouvel Envol » accueille toute l’année des oiseaux blessés ou en détresse avec pour mission de leur prodiguer des soins, les réadapter puis les rendre à la nature. Nous avons interviewé Mélanie Fellay, présidente de l’association afin de mieux connaître l’activité du centre de soin et l’histoire nos amis à plumes. Passant de la consommation d’insectes nuisibles à l’agriculture ou à la dissémination des graines pour la reforestation et à la pollinisation des plantes, les oiseaux ont un rôle essentiel au sein de la biodiversité et pour son maintien. Pourtant sa population est en perpétuelle déclin. A Nouvel Envol, on identifie trois principales causes d’accueil, malheureusement souvent mortelles : Les attaques de chats domestiques, les chocs contre les fenêtres et les destructions des nids à cause des tailles d’arbres et de haies ainsi que des travaux sur les toitures qui se font toujours pendant les périodes de nidifications. « Les appâter peut également créer des carences. Les moineaux friands de McDo ne sont pas en très bonne santé ».L’association a été créée en 2015 par Charlotte Glauser. A ses débuts, elle avait une activité de transport d’oiseaux sauvages blessés vers les centres de soins agrées les plus proches. C’est en 2017, que Charlotte lègue la présidence à Mélanie Fellay qui après avoir recueilli plusieurs oiseaux en détresse à son domicile a ouvert la station de soins aux Marécottes en partenariat avec Aurélie Berthod. Amenés principalement par des privés et quelques garde-faune avec lesquelles l’association collabore, toutes les espèces y sont hébergées : du petit roitelet huppé à l’aigle royal en passant par les martinets, les corneilles et autres rapaces, granivores ou insectivores.On dénombre environ 70 espèces différentes. Ici pas de discrimination, chaque vie compte.
Pourtant, ne recevant pour le moment pas de subventions cantonales ou communales et comptant exclusivement sur les dons, les locataires sont logés dans des caisses individuelles ou collectives selon les oiseaux à l’intérieur d’une caravane respectant toutes les normes cantonales. Le centre dispose également de quatre volières servant généralement d’étape transitoire avant leur relâcher. A ce jour, 1 700 individus ont fait un séjour plus ou moins long au centre de soins. Un des autres objectifs qui lui tient à cœur, est la sensibilisation au grand public, que ce soit sur les oiseaux sauvages en général, leur mode vie, de reproduction ou sur les causes de blessures qui peuvent être évitées par la dissémination de prévention. « Je n’ai pas mis en place une station de soins par envie mais par mission de vie, je crois. Je pense que les oiseaux m’ont choisi plus que je ne les ai choisis moi-même. » Comme chaque projet de vie que l’on mène avec le cœur, Mélanie a rencontré des difficultés. Le premier étant celui de n’être pas formée. Elle s’est instruite en autodidacte et a créé un partenariat avec une vétérinaire professionnelle qui donne bénévolement de son temps pour sauver ces êtres sauvages en y apportant un diagnostic rigoureux. Comme elle le dit elle-même « Je pense que les règles du jeu dans la vie sont ainsi, si on souhaite accomplir quelque chose et qu’on travaille dur pour, que l’on se donne vraiment les moyens, on peut tous déplacer des montagnes et franchir les obstacles afin de parvenir à mettre en place n’importe quel projet, de n’importe quelle importance, du moment que les choses sont motivées par le cœur ». C’est après un stage en Bretagne en 2015 qu’elle a eu le déclic. Aujourd’hui, Nouvel Envol est composé d’une équipe de nombreux bénévoles compétents qui se relaie sept jours sur sept pour le bien-être de ses pensionnaires. Pour donner une idée de l’intensité de l’activité voici quelques chiffres parus dans le rapport annuel de 2021 : 2300 appels, 2 fois plus de corvidés, 7800 box lavés, 300 000 vers de farine, 2910 heures de présence, 491 accueils et 30 jours, c’est la durée moyenne de séjour d’un oiseau. Chaque année, de plus en plus d’individus atterrissent au centre. Ce dernier est une solution concrète à l’effondrement des populations. C’est pour cette raison que son ouverture a été un soulagement pour plusieurs acteurs dont le canton du Valais. En particulier les garde-faune qui devaient avant son ouverture se déplacer jusque dans le Vaud. Elle est la seule structure de cette veine dans cette partie de la Suisse.
En 2021, 53 % de nos amis à plumes faisant partie de la liste rouge ont pu être remis en liberté. De manière générale un oiseau sur trois retrouve son envol après avoir transité par le centre et quand bien même parfois cela n’est pas le cas, elle leur offre l’espace de passer leur dernier moment au calme ou tout simplement d’être endormi sans aucune souffrance. Pour donner encore quelques chiffres concrets, 35 % sont relâchés, 8 % sont euthanasiés, 31 % de décès et 24 % de décès dans les 24h. Bien que réconfortant, chacun d’entre nous est en mesure d’adapter ses comportements et ses gestes pour participer au ralentissement de leur disparation. Avant tout il faut une prise conscience globale. « A la station de soins je ne vois quasiment jamais un oiseau être acheminé pour « cause naturelle » ». Effectivement, victime des activités humaines et de sa démographie exponentielle qui réduit leur espace de vie, leur lieu de nidification ; nous sommes par conséquent les premiers responsables mais aussi les plus à même à pouvoir y remédier, parfois par le biais de simples gestes. Par exemple, se rendre compte que nos fenêtres sont ou peuvent s’avérer meurtrières, nous permettra d’y pallier en les rendant visibles. Il existe aujourd’hui des moyens très efficaces et très esthétiques à la portée de tous. Une autre cause du déclin des populations est l’utilisation excessive d’insecticides qui intoxiquent les insectes et de fait, la nourriture des oiseaux.
A petite échelle, il est possible de semer des plantes indigènes dans nos jardins pour créer un biotope qui les attirent ou de laisser un coin de jardin sauvage pour qu’ils puissent se cacher en cas de danger… Plus globalement lutter contre une agriculture intensive qui détruit nos sols, pollue la nourriture des oiseaux et détruit leurs maisons fait aussi partie d’un processus de prise de conscience. Cela peut commencer par nos modes de consommation. Sur le site internet de Nouvel Envol sous l’onglet #SENSIBILISATION, on y trouve beaucoup d’articles de prévention qui propose des solutions accessible à tous. Dans un avenir que le centre espère proche, Nouvel envol a un beau projet de construction. L’association souhaiterait se transformer en station de soins suffisamment grande pour accueillir tout type d’oiseau comme le gypaète, l’aigle royal ou encore le grand duc présent en Valais. Ces derniers ont besoin de grands espaces même s’il s’agit d’une détention provisoire. A ce jour, l’architecte qui collabore avec le Centre a dessiné minutieusement des plans qui ont été envoyés au canton pour une « demande de renseignements » afin d’en savoir plus sur la faisabilité d’un tel dessein dans le lieu où Nouvel Envol a posé ses bagages il y a maintenant sept ans.« Affaire à suivre … Nous ne manquerons pas d’informer le grand public sur les prochaines étapes de ce projets ».En attendant, si vous souhaitez soutenir le centre, il est possible de faire des dons directs ou tout simplement de parrainer un oiseau. Tous les renseignements sont disponibles sur leur site internet .